BDCREE

Chambre de Recours des Ecoles européennes

Numéro de décision: 12/19


Date de décision: 20.08.2012


Mots-clés

  • section linguistique (à l'inscription)
  • erreur de droit
  • vice de forme / de procédure
  • test de langue
  • portée et exécution des décisions de la Chambre de recours
  • frais et dépens

Texte intégral

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Abstract

8. Le recours des requérants est recevable (voir l'article 50.bis, points 2 et 3 du RG) et fondé. En statuant sur l'admission de l'enfant des requérants dans la section linguistique italienne et non dans la section linguistique germanophone de la première classe du cycle primaire à l'Ecole européenne de Munich, l'Ecole a commis une erreur de droit et la décision est donc annulée.

9. En application de l'article 50.bis, paragraphe 1 du RG, les décisions portant sur une demande d'inscription ne peuvent faire l'objet d'un recours de la part des représentants légaux de l'élève dans le seul cas où il est démontré que la décision est affectée d'un vice de forme ou que des faits nouveaux et pertinents sont présentés. Selon l'article 47, point e), premier alinéa du RG, un principe fondamental des Ecoles européennes est l'enseignement dans la langue maternelle/langue dominante. Ce principe de base implique l'inscription de l'élève dans la section linguistique de sa langue maternelle/langue dominante (L 1), là où cette section existe (article 47, point e), deuxième alinéa du RG). Lorsqu'un doute subsiste pour déterminer la langue maternelle ou la langue dominante, dont l'enseignement a fait l'objet d'une demande des parents au moment de l'inscription, le Directeur peut demander la preuve du niveau linguistique de l'enfant et, au besoin, faire passer à l'enfant un test linguistique qui est organisé et contrôlé par les professeurs de l'école. En fonction des preuves rapportées ou, le cas échéant, le résultat du test, le Directeur décide de l'attribution de l'élève dans une section linguistique (article 47, point e), quatrième alinéa du RG). Dans le cas d'indications erronées, au moment de l'inscription, l'attribution dans une section linguistique peut être corrigée (article 47, point e), cinquième alinéa du RG). En cas de désaccord des parents sur la décision du Directeur, celui-ci prend l'avis de l'inspecteur concerné. Sur la base de cet avis, le Directeur réexamine le cas et prend une nouvelle décision ; soit pour confirmer sa décision antérieure, soit pour déférer à la demande des parents (article 47, point e), sixième alinéa du RG).

10. Au vu de ce cadre juridique, la décision des EE est entachée d'un vice de forme. De plus, il existe des faits nouveaux et pertinents dont la décision attaquée n'a pas pris en compte.

11. Dès lors que les requérants étaient en désaccord avec la décision du Directeur de l'Ecole européenne de Munich, ce dernier devait prendre l'avis d'un inspecteur, conformément à l'article 47, point e), sixième alinéa du RG, ce qu’il n’a pas fait.

12. Le Directeur de l'Ecole européenne de Munich était tenu à demander cet avis, même s'il n'avait pas lieu de nourrir, au vu du formulaire d'inscription de 2010 pour l'inscription dans le cycle maternel, un doute sérieux (citoyens italiens, parents italiens, aucune mention de la région du Tyrol du Sud ou de la communauté linguistique germanophone, lieu de résidence : […]). De façon certaine, l'italien était et est la langue maternelle de [V]. Il est pertinent pour les EE de renvoyer à la définition de la langue maternelle, au sens que lui confère le règlement général, comme étant celle connue de l'enfant depuis sa naissance.

13. Néanmoins, d'autres circonstances devaient susciter des doutes chez le Directeur de l'Ecole européenne de Munich lorsqu'il a tranché sur l'admission, et devaient l’amener à vérifier si la langue allemande devait ou non être considérée comme étant désormais la langue dominante de [V] et donc à lui faire passer un test linguistique.
[V] vit depuis plusieurs années en Allemagne et dans un milieu linguistique et culturel germanophone. Pendant deux ans, il a suivi l'enseignement de la section linguistique germanophone du cycle maternel de l'Ecole européenne de Munich. En outre, la demande d'inscription, qui remonte à plus de deux ans, a été envoyée depuis les Pays-Bas, où la famille résidait à l'époque. Dans cette demande d'inscription, les requérants avaient également déjà demandé la section linguistique germanophone (Langue: DE). Sur la base de ces simples faits, l'Ecole européenne de Munich ne devait pas se fier uniquement aux données et dates anciennes, mais elle devait au moins actualiser ces données. Cela d'autant plus que d'une part, la détermination définitive de la langue d'enseignement ne peut être basée sur la compétence linguistique correspondant à l'entrée dans le cycle maternel et que, d'autre part, le formulaire d'inscription initial ne contenait aucune indication laissant penser que les données produites pour une admission dans le cycle maternel serviraient également de base pour l'entrée à l'école [primaire] et comme référence durable pendant tout le temps de la scolarité d'un élève. Si l'Ecole européenne de Munich avait attiré l'attention des requérants sur ces points, ceux-ci auraient pu présenter des informations plus récentes sur les aspects actuels (centre de vie : Munich, enseignement maternel en allemand, relations et cercle d'amis germanophones et caractéristique déterminante : lien avec le centre d'intérêts de vie germanophone dans le Tyrol du Sud) et ces éléments auraient obligatoirement conduit le Directeur de l'Ecole européenne de Munich à nourrir des doutes, l’amenant alors à vérifier si la langue dominante n'était pas désormais la langue allemande.

14. Que ces indications puissent être complétées ou corrigées, est démontré par l'article 47, point e), cinquième alinéa du RG. Cet article prévoit en effet qu'il est possible de corriger des indications erronées, au moment de l’inscription. Vu que ce règlement permet de façon évidente de corriger non seulement des données enregistrées qui sont réputées erronées, mais également d'adapter les indications en fonction d'une situation de vie nouvelle, il est nécessairement possible de prendre en considération des priorités nouvelles dans la détermination des langues et donc de définir une nouvelle langue dominante — même ultérieurement. Cela est d'autant plus vrai que, l'esprit et la finalité d'une formation scolaire dans la langue maternelle ou dans la langue dominante sont de donner aux élèves de l'EE la possibilité de réintégrer un système éducatif national, notamment dans leur pays d'origine ou dans leur pays d'accueil.

15.Considérant que des doutes existaient quant à la langue maternelle / langue dominante de l’enfant, l'Ecole européenne de Munich pouvait demander une preuve du niveau des compétences linguistiques de [V] et, au besoin, lui faire passer un test conformément à l'article 47, point e), quatrième alinéa du RG. Etant donné que rien n'a été fait en ce sens, la décision de l'EE doit être annulée. L'Ecole européenne de Munich devra procéder aux vérifications nécessaires. Son Directeur devra ensuite prendre une nouvelle décision quant à l'admission dans l'une des deux sections linguistiques en cause.

16. Pour les motifs exposés (voir point 14), la demande subsidiaire des requérants visant l'admission de [V] en première classe du cycle primaire de la section linguistique germanophone, doit être rejetée.

Frais et dépens
17. Les deux parties ayant demandé dans leurs écrits qu'il soit statué sur les frais et dépens, la Chambre de recours peut décider, sur base de l'article 27 du règlement de procédure, de les partager entre les parties. Considérant les circonstances particulières du litige, un tel partage semble justifié. Une violation des règles de procédure est certes constatée en l’espèce, et elle entraîne l'annulation de la décision attaquée. Les requérants n'obtiennent pas pour autant gain de cause quant à leur demande de diriger leur fils dans la section linguistique germanophone de l'Ecole européenne de Munich. En application de l'article 27 du règlement de procédure, dernier alinéa, la Chambre de recours décide par conséquent que les parties doivent être condamnées chacune à supporter leurs propres dépens.