BDCREE

Complaints Board of the European Schools

Decision Number: 21/34


Decision Date: 02.09.2021


Keywords

  • Central Enrolment Authority
  • enrolment phase 2 (force majeure)

Full Text

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Abstract

Appréciation de la Chambre de recours
(...)
Sur le fond
, (...)
10. Concernant ces dispositions et l’organisation des inscriptions en deux phases, la Chambre de recours a estimé que le droit d'accès aux Ecoles européennes ne saurait dispenser les intéressés du respect des délais précisément fixés pour introduire les demandes d'inscription, lesquels sont d'autant plus impératifs à Bruxelles vu l'existence de plusieurs Ecoles européennes, comprenant de nombreuses sections linguistiques et un très grand nombre d'élèves. L’organisation des inscriptions en deux phases, ainsi que l’imposition de délais stricts pour l’introduction des demandes, constituent des mesures indispensables au bon fonctionnement des Ecoles européennes de Bruxelles et à l’optimisation des places disponibles ; elles sont nécessaires, raisonnables et proportionnées à l’objectif de leur mission.
Comme l’a précisé la Chambre de recours à de nombreuses reprises, « Il appartient donc aux parents concernés par cette disposition d’agir en bon père de famille, en prenant toutes leurs précautions nécessaires pour assurer le dépôt du dossier dans les délais impartis » (voir notamment décisions 19/32 (point 13), confirmé par 20/58 et 20/64).

11. Par ailleurs, il appartient aux demandeurs qui se prévalent d’un cas de force majeure pour justifier l’introduction de leur dossier en deuxième phase, d’apporter la preuve, dès cette introduction, de la réalité d’évènements purement objectifs et indépendants de leur volonté, de nature à faire indiscutablement obstacle, contrairement à ce qu’était la volonté des intéressés dès ce moment-là, au dépôt de cette demande en première phase.
La force majeure n’est généralement admise que si une situation objective, indépendante de la volonté des demandeurs les a empêché d’introduire la demande d’inscription en première phase ; selon une jurisprudence constante de la Cour de Justice de l’Union européenne, cette situation est caractérisée par l’apparition de circonstances étrangères à celui qui l’invoque, anormales et imprévisibles, dont les conséquences n’auraient pas pu être évitées, malgré toutes les diligences déployées (voir par exemple, arrêt CJUE du 5 février 1987, 145/85, Denkavit/Belgique).
Il est communément admis que la force majeure est un événement imprévisible, irrésistible, insurmontable et indépendant de la volonté du débiteur, l’ayant empêché d’exécuter son obligation.
Echappe ainsi à un cas de force majeure, un évènement ou une situation qui serait le résultat d’une action ou d’une inaction volontaire des personnes qui entendent s’en prévaloir.

12. C’est dans le cadre réglementaire ainsi défini qu’il convient d’examiner les éléments présentés par les requérants comme constitutifs de force majeure.

13. En l’espèce, il est constant que le jeune [...] poursuivait de manière continue sa scolarité à l’Ecole européenne Bruxelles IV depuis 2012 et la 2ème année primaire, ainsi d’ailleurs que sa fratrie, et qu’il était scolarisé dans cet établissement au cours des mois ouverts pour la première phase d’inscription des nouveaux élèves de catégorie I. Dès lors, il ne pouvait - ni ne devait - participer à cette première phase d’inscription.
Il résulte par ailleurs de ses bulletins scolaires de l’année 2020-2021 que ses résultats se sont dégradés très fortement en cours d’année, en particulier au début de l’année 2021, alors qu’en raison de la pandémie COVID 19, les Ecoles européennes dispensaient largement un enseignement à distance se substituant aux cours habituels. L’Ecole ellemême a attiré l’attention des requérants par une lettre du 2 février 2021 leur faisant part de son inquiétude face aux performances académiques de [...], notamment le « manque d'investissement réel pour les cours en ligne ». L’Ecole soulignait qu’«il serait dès lors opportun de mettre tout en place pour les combler au· plus vite » et que « des efforts doivent être fournis et des mesures prises en vue d'améliorer les résultats actuels.». Dans l’intérêt de la scolarité de leur fils, les requérants l’ont alors inscrit dans un internat en France dispensant encore un enseignement en présentiel.
Lors de l’inscription de leur fils en deuxième phase, les requérants ont invoqué ces circonstances comme constitutives de force majeure.

14. Même si, comme le font valoir les Ecoles européennes dans leur mémoire en défense, la décision de scolariser leur fils dans un internat ne constitue pas une décision extérieure aux parties, il n’en reste pas moins qu’elle a été prise en réaction à la baisse très sensible des résultats de [...] en début d’année 2021 dans un contexte où, en raison de la pandémie COVID 19, les modalités de l’enseignement dispensé par les Ecoles européennes étaient fortement modifiées et où il a éprouvé de grandes difficultés à suivre cet enseignement à distance. Cet ensemble de circonstances, qui a conduit au placement de leur fils en internat, ne peut être considéré résultant de la volonté des parents.
Par ailleurs, lors de leur demande d’inscription, les requérants ont apporté les éléments permettant de justifier ces circonstances pour caractériser la situation de force majeure qu’ils invoquaient.
Ainsi en considération de l’article 24, § 2 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, selon lequel « Dans tous les actes relatifs aux enfants, qu'ils soient accomplis par des autorités publiques ou des institutions privées, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale», la Chambre de recours considère que l'ensemble des circonstances décrites constituait un obstacle objectif et indépendant de la volonté des requérants les ayant empêchés de soumettre la demande de réinscription de [...] dans le délai imparti pour la première phase d’inscription. Ces circonstances constituent donc une situation de force majeure au sens de l'article 2.11 de la Politique d'inscription.

15. Au vu de ce qui précède, le recours doit être considéré comme fondé. Il n'est donc pas nécessaire d'examiner les autres moyens, soulevés par les requérants concernant le caractère non proportionné de la mesure et l’atteinte au droit à l’éducation.
Par suite, il y a lieu d’annuler de la décision de l’ACI du 2 juillet 2021 rejetant comme irrecevable la demande d’inscription de leur fils.