BDCREE

Complaints Board of the European Schools

Decision Number: 20/75


Decision Date: 20.10.2020


Keywords

  • language section (at the time of enrolment)
  • language test
  • particular circumstances
  • appraisal of pedagogical skills

Full Text

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Abstract

Sur le fond,
11. Il convient tout d'abord de rappeler que les dispositions de l'article 47 e) du RGEE:
(...)
12. Conformément à la jurisprudence constante de la Chambre de recours, il se déduit clairement de ces dispositions qu’il appartient aux Ecoles de déterminer, en suivant la procédure prescrite, la section linguistique appropriée à l’enfant dont l’inscription est demandée et que le choix de cette section n’appartient donc pas aux seuls parents, mais doit résulter d’une appréciation pédagogique de l’école réalisée dans l’intérêt de l’enfant, au vu des informations fournies par ses parents et de l’avis des experts, via les tests (voir à ce sujet, entre autres, les décisions 15/51, 18/08, 18/22, 19/51, 19/59 et 20/15).

13. En l’espèce, la Chambre de recours ne peut que constater que :
- les requérants, tous deux de nationalité espagnole, ont demandé́ que leur fille [...], également de nationalité espagnole, soit inscrite dans la section francophone ;
- la direction de l’Ecole a eu des doutes quant à la langue maternelle/dominante de l’enfant et a décidé́ de la tester en espagnol et en français, ceci en application de l’article 47 e) précité́ ;
- sur base des résultats de ces tests comparatifs, la directrice de l’Ecole a pris la décision pédagogique sur laquelle s’appuie la décision de l’ACI, à savoir de scolariser N, dans son intérêt, dans la section linguistique qui lui convient le mieux, à savoir la section espagnole ; le contexte familial, notamment le fait que plusieurs membres de sa famille parlent le français et que [...] désire continuer sa scolarité (commencée au Lycée Français de Madrid) dans cette langue, ne peut constituer une circonstance particulière de nature à invalider une décision pédagogique prise dans l’intérêt bien compris de l’élève ;
- certes [...] a un très bon niveau en français (qualifié de « supérieur ») - ce qui n’est pas contesté - mais son niveau en espagnol est encore meilleur (qualifié de « distinctement supérieur ») ;
- les requérants n’ont formulé́ aucun grief quant à la régularité́ des tests, ni quant à leur conformité́ aux règles de procédure établies pour leur réalisation, et n’ont allégué́ aucun vice dont ces tests comparatifs seraient affectés ; les Ecoles affirment d’ailleurs, sans être contredites par les requérants, que les lignes de conduite pour l’organisation des tests de langue en maternelle ont toutes été respectées (lieu, durée, nombre d’enseignants compétents …) ; la Chambre de recours n’aperçoit pas en quoi les conditions dans lesquelles les tests ont été menés, peut-être intimidantes pour [...] mais comme elles peuvent l’être pour tout autre enfant du même âge, auraient pu fausser les résultats ou empêcher la comparaison objective des résultats ;
- certes l’enfant a été́ scolarisée auparavant en français, mais pas dans le cycle primaire ou secondaire ; la présomption permettant de déroger à la règle de l’enseignement dans la langue maternelle/dominante, prévue au deuxième alinéa de l’article 47 e) du RGEE, ne peut dès lors trouver à s’appliquer pour [...] et il ne doit pas en être tenu compte, contrairement à ce que les requérants prétendent ; il importe ici de rappeler que la détermination de la langue maternelle/dominante à l’inscription doit être le fruit d’une appréciation pédagogique propre à chaque élève « qui peut donc varier même entre les enfants d’une même fratrie ; la décision sur la section linguistique implique un examen au cas par cas, ce qui peut justifier des résultats différents (…) » (voir décisions 18/27 et 15/51 point 11).
- enfin, la décision litigieuse ne peut être invalidée du fait que le directeur, en définissant, sur la base des tests comparatifs et dans l’intérêt de l’enfant, l’espagnol comme langue maternelle/dominante de N, n’aurait pas tenu compte du contexte familial comme une circonstance particulière, en particulier l’importance du français dans le cercle familial ; en effet, comme les Ecoles européennes l’ont par ailleurs à juste titre fait remarquer dans leur mémoire, depuis la modification de l’article 50 du RGEE en décembre 2018, cet article n’a plus vocation à s’appliquer aux questions relatives à la détermination de la Langue 1.

14. En outre, selon une jurisprudence constante de la Chambre de recours, les appréciations pédagogiques et scolaires des élèves, aussi bien de façon générale qu’en matière de tests linguistiques destinés à déterminer la section linguistique au moment de l’inscription, relèvent de la compétence exclusive des enseignants et ne peuvent pas être soumises au contrôle juridictionnel de la Chambre de recours, sauf erreur manifeste d’appréciation ou si elles violent les règles de procédure ou encore, en cas de fait nouveau pertinent conformément à l’article 50 bis du RGEE (voir à ce sujet, par exemple, les décisions 17/13, 18/12 et 20/15, ainsi que les ordonnances motivées 19/01 et 19/55).
A ce sujet, le vice de procédure tiré de l’absence de communication des résultats des tests et des noms des enseignantes chargées de les réaliser doit être rejeté : en effet, les rapports d’évaluation des deux tests linguistiques sont joints au courriel du 2 septembre 2020 envoyé aux requérants par la directrice de l’Ecole.
Comme dit plus haut, la Chambre de recours n’aperçoit dans les arguments avancés par les requérants aucun motif autorisant à regarder lesdits tests linguistiques comme irréguliers, invalides ou viciés.

15. Les considérations liées aux projets de vie (tant privée que professionnelle) des requérants après leur séjour à Bruxelles ne sont pas de nature à remettre en cause la légalité de la décision de scolariser [...] en section espagnole.
En effet, « les considérations des requérants sur leurs perspectives professionnelles et leurs mutations de poste prévisibles ne peuvent suffire à mettre en échec l'application d'un tel principe » [principes de l’article 47 e)] (voir le point 25 de la décision 16/20). Dans le même sens, « (…) aussi légitimes que soient les considérations des requérants concernant l’évolution linguistique de leur enfant dans la perspective de ses études futures dans le cadre d’un parcours international de sa famille, la Chambre de recours ne trouve aucun motif qui pourrait justifier l’annulation de la décision attaquée (point 9 de la décision 14/17).

16. De même, l’éventualité (et non la certitude) que [...] ne puisse plus pouvoir réintégrer le Lycée Français de Madrid n’est pas de nature à remettre en cause la légalité de la décision de scolariser [...] en section espagnole.
Ce n’est pas parce que [...] est scolarisée en section espagnole que son niveau en français va baisser : non seulement, tout en étant élève de la section espagnole, elle pourra bénéficier d’un enseignement en français en tant que Langue 2, mais elle pourra également pratiquer cette langue dans le cadre de ses activités parascolaires.
La Chambre de recours n’aperçoit enfin pas en quoi une scolarisation en section espagnole priverait [...] des « principes européens », ou en quoi une scolarisation en section francophone les rendrait plus concrets, les Ecoles européennes développant ces valeurs européennes pour les élèves de toutes les sections linguistiques.

17. Il ressort de tout ce qui précède que la Chambre de recours ne peut que constater que c’est en toute conformité avec sa jurisprudence constante et avec la réglementation en vigueur au sein du système des Ecoles européennes, que l’espagnol a été considéré comme la langue maternelle/dominante de [...], déterminant la section linguistique dans laquelle elle devait être inscrite.
Le présent recours ne peut qu’être rejeté comme non fondé.