BDCREE

Beschwerdekammer der Europäischen Schulen

Entscheidungsnummer: 22/04


Entscheidungsdatum: 11.10.2022


Stichwörter

  • Disziplinarausschuss
  • Zuständigkeit der Beschwerdekammer (ratione materiae)
  • Rechtmässigkeit
  • Grundsatz der Verhältnismäßigkeit

Volltext

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Abstract

Appréciation de la Chambre de recours
Sur la compétence “ratione materiae” de la Chmbre de recours,
13. La Chambre de recours est compétente pour connaître du présent litige.
En effet, si l’article 44.9 du RGEE dispose qu’ « une exclusion temporaire dépassant dix jours ouvrables, ou une exclusion définitive, peut faire l’objet d’un recours auprès du Secrétaire général », la Chambre de recours a toutefois estimé, dans sa décision 15/38 (point 12) que « toutes les mesures disciplinaires qui impliquent pour l’élève une exclusion de l’école – même temporaire - et qui, de ce fait, affectent profondément le lien fondamental entre l’école et l’élève et son droit à l’éducation reconnu par l’article 14 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, peuvent être soumises à un contrôle judiciaire par application des principes applicables dans un État de droit (cf. Article 47 de la même Charte) ».
C’est également sur base du droit à un recours effectif que la Chambre de recours a estimé pouvoir contrôler la légalité d’exclusions temporaires de moins de 10 jours (voir en ce sens les ordonnances de référé 12/59 R sur droit au recours effectif (points 13 à 16) et 13/65R et la décision 15/38 (point 12).

Sur la recevabilité,
14. La recevabilité du recours n’est pas discutée.

Sur le fond,
(...)
Quant à la demande d’annulation de la sanction disciplinaire,
Légalité, proportionnalité et caractère pédagogique de la sanction

16. Il ressort des pièces du dossier que l’élève a reconnu avoir commis les faits pour lesquels il a été sanctionné : des affichages sans autorisation, répétés malgré le retrait systématique des affiches par le personnel de l’Ecole et le rappel des règles par email du 12 janvier 2022 à l’attention des élèves du cycle secondaire - rappel dont l’élève n’a pas contesté la réception. Il s’agit donc d’une répétition voulue et assumée par l’élève d’un acte interdit par le Règlement de l’école.
Contrairement à ce qu’affirment les requérants, il n’apparaît pas des pièces du dossier que l’élève aurait été sanctionné pour les retentissements médiatiques. La lettre aux parents du 10 février 2022, notifiant la décision disciplinaire et ses raisons,précise en effet que « [...] nous a assuré qu’il n’était pas la personne qui avait contacté la presse ». Cette affirmation n’a pas été remise en cause par l’Ecole, qui s’est seulement référée aux critiques dans les médias pour, selon les termes de la lettre, faire réfléchir l’élève sur les conséquences de ses actes. La mention des conséquences médiatiques et de la mauvaise publicité dont l’Ecole a été sujette n’affecte en rien la légalité de la décision disciplinaire.
Contrairement à ce que prétendent les requérants également, ce n’est pas parce que le Règlement d’ordre intérieur de l’Ecole ne prévoit pas de sanction en cas d’affichage(s) non autorisé(s) que cet acte ne serait pas considéré comme grave par l’Ecole, ou que la sanction prononcée n’aurait pas de base légale.
La sanction disciplinaire prononcée en l’espèce trouve sa base légale :
• en général, dans le RGEE (Chapitre VI – Règlement de discipline) :
Article 41 :
Tout manquement de la part des élèves aux règles de l’Ecole et aux règles générales de la vie en commun au sein de l’Ecole, fait l’objet d’une mesure disciplinaire
Article 42 :
a) Le classement des diverses mesures disciplinaires ne signifie pas que l'une d'entre elles ne peut être utilisée qu'après recours aux précédentes (…)
b) Dans le cycle secondaire, les mesures disciplinaires applicables sont les suivantes : (…) 6. Exclusion temporaire de l'école :
- par le directeur, pour un maximum de trois jours ouvrables
- par le directeur sur proposition du Conseil de discipline, pour une durée maximale de 15 jours ouvrables

• plus spécifiquement, dans le Règlement d’ordre intérieur de l'Ecole, qui stipule en son article 11 § 4.2:
L’affichage, la publication et la diffusion de documents (textes, revues, communications, affiches, messages et documents diffusés sur le réseau électronique…) sont autorisés pour autant qu’ils aient reçu l’aval formel de la Direction. L’affichage des documents approuvés par la Direction se fera seulement aux endroits prévus. Les murs intérieurs et extérieurs de l’école doivent rester libres d’affichage et de toute publicité, sauf autorisation préalable de la Direction. La mise en place de l’affichage, après accord de la Direction, se fera sous la surveillance du concierge
En l’espèce, il y a eu plusieurs manquements aux règles, et cela de manière délibérée et répétée. En de tels cas, le Directeur peut, conformément au RGEE, infliger à l’élève concerné une sanction disciplinaire pour maintenir l’ordre et la discipline dans l’Ecole.
Le principe même d’une mesure disciplinaire ne peut dès lors être sérieusement discuté, ni sa base légale.

17. Il n’appartient pas au juge de substituer sa propre appréciation à celle portée par le Directeur (ou le Conseil de discipline) sur la gravité des manquements relevés et sur la sanction que ceux-ci appellent, sauf si la sanction apparait comme disproportionnée ou entachée d’une erreur manifeste d’appréciation. Le principe de proportionnalité implique que la sanction pour manquement à une obligation ne dépasse pas les limites de ce qui est nécessaire et approprié pour atteindre le but visé par la règle (voir en ce sens la décision 19/16, point 16).
A ce sujet, la Chambre de recours constate que la Direction de l’Ecole, tout en considérant les actes de l’élève non tolérables car manifestement en violation du Règlement de l’école, a tenu compte de la proportionnalité de la sanction infligée. En effet, elle n’a pas jugé nécessaire de convoquer le Conseil de discipline, lequel peut proposer des sanctions beaucoup plus sévères (cf. l’article 42.b.6 précité et l’article 43.4 du RGEE). La notification de la sanction aux parents signale par ailleurs que c’est seulement “en cas de récidive ou d’un nouveau manquement au règlement [que] l’élève fera l’objet d’un conseil de discipline”.
La sanction prononcée en l’espèce pour l’affichage sans aval préalable et formel de la Direction, et donc sans autorisation, ne parait dès lors pas disproportionnée à la gravité des faits ou entachée d’une erreur manifeste d’appréciation, au vu du caractère délibérément répété des manquements, malgré le message de rappel des règles (email du 12 janvier 2022) et alors que les affiches étaient enlevées au fur et à mesure par le personnel de l’Ecole.
Quant à l’affirmation des requérants selon laquelle la sanction serait disproportionnée par rapport au fait que d’autres affichages (autocollants en faveur du climat ou de la paix par exemple) seraient restés sans suite, la Chambre de recours relève qu’aucune pièce du dossier ne démontre que ces autres affichages auraient été autorisés par la Direction ou que, dans le cas contraire, ces actes seraient restés sans suite alors que les auteurs auraient été connus ou découverts. Les requérants n’apportent pas non plus la preuve que tel aurait été le cas. Quoiqu’il en soit, ainsi que la Chambre a déjà pu le souligner dans sa jurisprudence, “il ne peut être invoqué par un justiciable, pour justifier son droit, une illégalité faite en faveur d’une autre personne, ou pour comparer deux sanctions illégales” (voir en ce sens la décision 19/16, point 15).

18. Enfin, en infligeant une sanction qui ne s’est pas limitée à une simple exclusion de 2 jours, pendant lesquels l’élève a par ailleurs pu réfléchir sur l’impact de ses actes sur la communauté scolaire, mais qui a également invité ce dernier à rendre service à la communauté des élèves en consacrant au surplus 8 périodes au soutien en mathématiques à un condisciple, le Directeur a bien respecté le caractère pédagogique de la sanction (cf. l’article 40 du RGEE).

Neutralité de l’école publique et liberté d’expression des élèves au sein de l’école
(...)
20. Contrairement à ce qu’affirment les requérants, l’interdiction de l’article 11 du Règlement de l’Ecole, n’affecte nullement la liberté d’expression des élèves. L’Ecole a parfaitement le droit de réglementer les modalités de cette liberté, laquelle n’est par ailleurs pas absolue, comme le démontrent les dispositions pertinentes des instruments internationaux en matière de droits de l’homme, citées par les Écoles européennes. En effet, il ressort également des pièces du dossier qu’à aucun moment il n’a été reproché à [...] de partager le cas échéant l’idéologie du candidat présidentiel en question, ni de vouloir exprimer ses opinions politiques personnelles. Il a par ailleurs pu le faire en toute liberté lors de l’audition du 4 février 2022 à l’Ecole. De plus, d’autres possibilités pour s’exprimer existaient, comme par exemple l’organisation, à la demande de l’élève concerné, d’un débat (contradictoire) en classe, où toute conviction politique aurait pu être exprimée.

Quant à la demande d’annulation de la conservation pendant 3 ans de l’inscription de la sanction disciplinaire au dossier individuel de l’élève.
21. Il faut tout d’abord préciser que c’est à tort que les requérants présentent l’inscription des mesures disciplinaires dans le dossier individuel de l’élève comme une sanction en soi : cette inscription ne fait pas partie de la liste des sanctions possibles énumérées à l’article 42 a) précité du RGEE.
L’inscription n’est que l’enregistrement administratif de la sanction prononcée, et est prévue par le RGEE, auquel les parents des élèves acceptent de se soumettre en inscrivant leur enfant.

22. Il faut ensuite préciser que seules les sanctions les plus légères du ‘catalogue’ de l’article 42 a) du RGEE (à savoir le rappel à l’ordre et le travail supplémentaire) échappent à l’inscription. Selon le deuxième alinéa de cet article, les autres mesures disciplinaires “sont inscrites dans le dossier individuel de l'élève et conservées pour une durée maximale de 3 ans”.
Comme la Chambre l’a déjà souligné dans sa jurisprudence antérieure, le principe de proportionnalité doit également être respecté dans l’application de cette règle. A cette lumière, la Chambre de recours a estimé “que l'Ecole devrait adapter la durée d'inscription de la sanction dans le dossier individuel de l'élève à la nature et à la sévérité de la sanction prononcée, en tenant compte du fait que la durée maximale est de trois ans et que la sanction infligée en l’espèce n'est pas trop sévère” (voir la décision 19/16, point 18)
Tenant compte du fait que :
- la sanction d’une exclusion temporaire de 2 jours (combinée avec une tâche pédagogique d’un jour), tout en n’étant pas une sanction trop sévère au vu des manquements constatés, est néanmoins une sanction se situant à la sixième place (sur huit) dans le ‘catalogue’ des sanctions disciplinaires (voir l’article 42.b.6, premier tiret) ;
- les sanctions en matière d’exclusion, y compris les exclusions temporaires de plus de 3 jours, également prévues par l’article 42.b.6 (deuxième tiret), se prennent pour la plupart sur proposition du Conseil de discipline ;
- la conservation, dans le dossier individuel de l’élève, de sanctions infligées sur proposition du Conseil de discipline, a, selon l’article 44.8 du RGEE d’office une durée de 3 ans,
la décision du Directeur de conserver en l’espèce l’inscription de la sanction infligée à [...] pendant 3 ans, durée maximale autorisée par l’article 42.a) deuxième alinéa, ne semble pas disproportionnée ou manifestement entachée d’une erreur manifeste d’appréciation.
Pour le surplus, la Chambre estime que l’acte purement administratif de la conservation pendant 3 ans de l’inscription d’une sanction disciplinaire dans le dossier individuel d’un élève titulaire d’un Baccalauréat, qui a définitivement quitté l’Ecole européenne concernée et qui a depuis lors été inscrit sans problème dans une institution d’enseignement universitaire, ne peut en tout cas plus causer à ce dernier un quelconque préjudice.
Il n’y a donc pas lieu d’annuler la durée de l’inscription de la sanction dans le dossier personnel de l’élève.

23. Il ressort de tout ce qui précède que le présent recours en annulation ne peut qu’être rejeté comme non fondé.