Abstract
Sur la légalité de la décision attaquée
8. Aux termes de l’article 58 du statut du personnel détaché auprès des écoles européennes : « 1. a) Une INDEMNITÉ DE RÉINSTALLATION d’un montant calculé selon les dispositions prévues pour l’indemnité d’installation visée à l’article 57, 1., a), suivant les modalités fixées à l’article 57, 2. du présent Statut, est attribuée au membre du personnel lors de la cessation définitive de ses fonctions (...) 2. Bénéficie de l’indemnité de réinstallation, le membre du personnel qui quitte le service de l’École: - au plus tôt à la fin de la cinquième année scolaire et - pour des motifs autres qu’une cessation de fonction à la suite de la révocation visée à l’article 75, 3. c) du présent Statut (…) 7. L’indemnité de réinstallation est versée sur justification de la réinstallation du membre du personnel et de sa famille, dans une localité située à 70 km au moins du lieu de l’École où il était affecté ou, si le membre du personnel est décédé, de la réinstallation de sa famille dans les mêmes conditions. - La réinstallation du membre du personnel, ou de la famille du membre du personnel décédé, doit avoir lieu au plus tard trois ans après la cessation de fonction ».
9. Il ressort de ces dispositions, comparées à celles de l'article 57 du même statut, consacrées à l'indemnité d'installation, et calquées sur celles annexées au statut des fonctionnaires de l'Union européenne, qu'il n'y a, ainsi que l'a jugé le Tribunal de première instance dans son arrêt du 24 avril 2001, Miranda c/ Commission (T37/99, Rec. FP p. II-413), aucune différence de fonctions entre l'indemnité d'installation et celle de réinstallation. En effet, il existe une analogie étroite de buts entre ces indemnités : l'une et l'autre visent à couvrir et alléger les charges découlant de l'installation du fonctionnaire dans un milieu nouveau pour une période indéterminée mais assez longue.
10. Si l'indemnité de réinstallation obéit, pour l’essentiel, aux règles prévues pour l’attribution de l’indemnité d’installation, elle s’en distingue néanmoins par la limitation imposée au paragraphe 7 de l’article 58 précité, selon laquelle elle n’est versée qu’en cas de réinstallation dans une localité située à 70 kms au moins du lieu de l’école où était affecté le membre du personnel.
11. A cet égard, s'il est aisé d'admettre que le notion de réinstallation dans un milieu nouveau implique au moins un changement de localité, il est difficile de percevoir en quoi une telle limitation de distance, qui n'est pas imposée pour l'attribution de l'indemnité d'installation, peut constituer en elle-même un critère objectif pour l’attribution de l’indemnité de réinstallation. La circonstance, invoquée par les Ecoles européennes, que le membre du personnel est libre de choisir son lieu de réinstallation alors qu'il est tenu de fixer celui de son installation à proximité de son lieu d'affectation ne suffit pas à justifier la règle selon laquelle seuls ceux qui se réinstallent au-delà d'une certaine distance kilométrique bénéficient de l'indemnité de réinstallation.
12. Il convient, en effet, de souligner que ladite indemnité ne couvre pas le remboursement des frais de voyage et des frais de déménagement, qui est expressément prévu aux articles 60 à 62 du statut. Elle vise donc, comme d’ailleurs l’indemnité d’installation, à prendre en compte des frais découlant d'un changement de résidence autres que des frais de transport et dont le montant n’est nullement lié à la distance séparant le lieu d’affectation du lieu de réinstallation.
13. Ainsi, on ne voit pas ce qui peut distinguer la situation de deux membres du personnel selon qu’ils ont choisi de se réinstaller à plus ou moins de 70 kms de leur lieu d’affectation. Dans les deux cas, ils s’exposent à des frais qui, s’ils peuvent être différents, ne le sont pas en raison de cette seule distance. D'autres considérations pourraient sans doute entrer en ligne de compte, comme celle de la fixation de la résidence dans un autre Etat membre, impliquant des formalités différentes, mais elles ne sont nullement liées à la distance, les frontières entre les Etats pouvant être situées aussi bien en deça qu'au-delà de celle retenue.
14. Dans ces conditions, M. [...] est fondé à soutenir, par la voie de l’exception d’illégalité, que la limitation fixée au paragraphe 7 de l'article 58 du statut, qui crée, par le seul critère de la distance sans retenir aucune autre considération objective, une distinction artificielle entre les membres du personnel, revêt un caractère discriminatoire.
15. Il en résulte que le refus opposé à la demande d’indemnité de réinstallation de l’intéressé, fondé sur ce seul critère, est lui-même entaché d’illégalité. Dès lors et sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens du recours, la décision par laquelle le Secrétaire général des écoles européennes a rejeté le recours administratif formé contre ce refus doit être annulée.